vendredi 30 octobre 2009

Sobriété


Sobriété mutée en de pareilles futiles
Que le jour s’endort.
Plainte craintive d’un silence épanoui
Dans le trait mal assorti de mes lignes.
Imparfaite sonore et spirante labiale
Voir en cette heure une fin de journée qui commence
Perdre l’accès à la prépondérance
Evanouir de remord le parchemin du vide
Et l’ampoule qui implore le contentement de sa mèche.
Le voile jette l’ombre sur l’opposé à terme
D’une main onglée de cire
Qui parsème le glauque sur un parterre de verre.
Le pas arrive, qui s’accélère
S’employant à rire du pavé
Et les paroles qui se moquent
Se pâment de l’ivresse des employés.
Ridicule de l’insignifiance
Je roule en boule vers qui me pense
Le laissant là, attendant
Que ma marche s’adonne à sa délivrance.
Et je pleure.

mercredi 28 octobre 2009

L'anneau

J’ai rêvé d’un homme qui portait à la main gauche un anneau
Mais j’ai cessé d’espérer.

J’ai fait depuis le choix de me contenter de la présence de l’être à mes côtés, de ses sourires et nos plaisirs à ne faire qu’être ensemble.
Je ne parlerais pas de déception mais uniquement de redéfinition du mot,
Moins beau, moins pure, différent de tout idéal.
Mais nécessaire.
Je ne parlerai plus que d’essentiel
Qui au fond de moi fait renaître ce rêve, d’avoir à mon doigt le symbole d’une union que ne pourrait rompre que la mort…

Si seulement…
Je pouvais arrêter de rêver
Et ne faire enfin qu’accepter.

mardi 27 octobre 2009

Le Soleil Meurt

Confiance abattue, regret d’une ligne,
Un pas en arrière, vers ce qui fut demain
Nostalgie peu amère de cet autre et sa main.

Incompréhension, comble d’une tentative
Poursuivant l’effort qui jamais ne s’estompe
Regarder l’étoile mourir et le ciel la pleurer
C’est une nouvelle place à prendre après s’être retiré

Qu’en est-il de ce sexe que tout devait indifférer ?
Qu’en est-il de ce corps qui ne désirait se laisser toucher ?

Et le bleu n’existe pas plus que le rouge
Le noir est inexistant et la transparence se repose
Ma peau est dans le manque de cet abandon serein
Cette pensée de lui sans nulle autre en son sein.

J’ai aimé sourire à le regarder dormir
J’ai coulé bien souvent lorsque l’inattention atterrait
Être là sans réel autre désir
D’être l’unique en canon de ces mots détruisant

Aujourd’hui le soleil est pareil à l’étoile,
Il jette un regard sans amour sur ce qui est labeur
Un différent encore sur ce qui est danger,
Il se lasse et il meurt, d’entre ses émotions se noyer,
Chavirement de la coque qui n’en peux plus de ramer

Il s’est menti, en croyant apercevoir la rive
L’apaisement soudain, attendu des cimes
Sans plus aucun contraste de mal suspicion,
Il s’est menti hier en croyant apercevoir la rive.

Aujourd’hui le soleil  meurt et n’a trouvé d’autre ciel que mes yeux pour le regarder mourir.

Imparfaite élégie

 Je suis l’épousée manifeste d’un cadavre incertain,
L’écorchée de trop de rires et l’amante orpheline
La sûreté déconcertante
Et la perfection restant à prouver.
 
Je suis l’inanimé portant la chute de l’amputé
Un remous dans le profond de l’eau
Un caillou dans le pied
Un naufragé miraculeux de ce trou noir qu’est son cœur
Une plaie béante de saletés où l’âme se perd à oser espérer.
 
Je suis le lierre qui s’accroche au mur dont les pierres croulent sous le poids du monde.
 
Je suis l’astre qui subit son éternité
Et le Dieu qui se lasse de jouer aux poupées.
 
Je suis l’être au sourire mutilé, au rire factice et à la pensée nouée.
 
Je suis cet arbre sans écorce que je me plaisais à dessiner,
Ce portrait sans contour
Cette photo sans image.
 
Ce quai déserté par les trains déjà morts.

jeudi 22 octobre 2009

Inceste


Un sursaut qui me fait reprendre le stylo pour éviter un nouvel assoupissement. Il fait encore nuit dehors et le stress de cette journée à venir me fait redouter le temps qui traîne.  

 
C’était le matin, surtout, pendant qu’ils dormaient encore.
C’était la nuit, parfois, après s’être assurée de leur endormissement.
C’était pendant leur absence, tout le temps, à chaque fois.
 
Je ne me souviens pas de mon âge mais ai gardé en mémoire le sien, à cette époque. Un âge approximatif. On finit par oublier ce qu’on refoule.
Le plus souvent, le matin et la nuit surtout, cela se passait dans ma chambre. Notre chambre, pour être plus juste. On fermait la porte, prenions le chien qui dormait à mes pieds, dans le lit du bas. La pièce n’était pas grande, juste assez de place pour un lit, que l’on avait superposé sur un autre, un bureau qui n’était pas le mien et un meuble à télé, dans lequel était la chaîne hifi, qui n’était pas la mienne. Moi, j’avais un petit poste radio que je cachais sous mon oreiller et que j’écoutais avec un casque pour m’endormir.
Vanda devait avoir quinze ans, peut être moins, en fait. Moi six de moins et nous jouions. Nous jouions aux jeux de rôles. Vanda était sur le lit du haut, les parents me pensaient trop jeune pour arriver seule à monter et descendre de l’échelle, surtout la nuit, parce que je portais des lunettes que j’enlevais pour aller me coucher. L’appartement n’était pas grand, nous partagions donc la chambre du fond, celle qui donnait sur le balcon. Je me souviens que nous la décorions, Vanda et moi, de toutes les façons possibles en fonction des périodes de l’année. C’était des fantômes et des sorcières pour l’automne, des guirlandes au plafond l’hiver, des cloches pour le printemps et des poissons multicolores renchéris de peluches sur des étagères l’été. Sans oublier les posters des chanteurs préférés de Vanda et ceux de chevaux sur mon mur. Oui, sur mon mur, parce que çà aussi nous devions nous le partager. Un mur était à Vanda, le plus grand, celui contre lequel était le bureau, et l’autre était à moi, celui contre lequel reposaient les lits, en face de la porte d’entrée. Le troisième mur était un placard mural sur toute sa longueur et le dernier n’était que les hautes et larges fenêtres qui menaient au balcon. C’était la pièce la plus chauffée de l’appartement et le matin, j’aimais monter sur le lit de Vanda, ayant pris soin auparavant d’ouvrir les volets, pour regarder le lever du soleil. Je montais le chien avec moi et m’asseyais au bord de l’échelle pour ne pas risquer qu’il ne tombe.
Mon autre sœur, notre aînée, suivait alors une formation de toiletteur canin à Mulhouse. Je me rappelle ce jour où, avec mon père, je l’avais accompagné à la gare. C’était la première fois que je voyais des trains d’aussi près. Quand le sien se mit à démarrer, j’ai eu comme une perte d’équilibre en croyant que c’était moi qui bougeais sur le quai !
A la maison, nous n’étions donc plus que quatre, Vanda, mes deux parents et moi.
 
Vanda était belle, tout le monde le disait. Moi j’étais, à comparer, comme le vilain petit canard qui n’excellait que par sa capacité de mémorisation.
Comme je l’ai dit plus haut, Vanda et moi jouions. Elle restait sur son lit et me donnait les consignes, les règles du jeu. Moi j’attendais en bas, en l’écoutant, pour que ce que je fasse lui convienne. Elle me disait de me mettre dans la peau d’un serveur, d’un passant inconnu, d’un routier, parfois même dans celle d’un violeur. Je devais alors inventer tout un scénario, auquel elle me donnait à coup sur la réplique. Je devais parvenir à un parfait jeu de séduction. Je devais, de mon envergure de petite fille, draguer ma sœur, bonnement et simplement. Une fois parvenue à la « séduire » en lui disant des mots dont j’ignorais le sens, elle prenait le pouvoir, me permettait de monter, moi l’homme que j’étais en ces instants, sur son lit. Et alors, elle me demandait de commencer par la déshabiller, puis de la caresser, tout en continuant mon jeu d’actrice. Mes mains innocentes parcouraient sa nuque, ses seins qui n’étaient pas encore formés, mais elle jamais ne me touchait. Je m’allongeais sur elle, nue mon tour, selon ses consignes. Il arrivait qu’elle me demande d’embrasser son pubis tout nouvellement pourvu d’un duvet de poils. Et moi, je faisais tout, innocemment, croyant ce jeu tout autant innocent que l’était encore mon âme, ne pouvant soupçonner l’interdit de ces pratiques, ignorant tout des corps.
Je jouais, comme avec une poupée, j’inventais une histoire que l’on m’avait suggérée et je touchais le sexe de ma sœur comme j’aurais pris sa main.
 
Une fois, mon père au travail, ma mère regardait la télévision au salon, ma sœur ferma la porte du couloir puis celle de notre chambre, ayant dit à ma mère que nos allions faire une sieste. On ferma les volets et le jeu recommença. Je rigolais à tue-tête, nue contre le corps nu de ma sœur. Je ne sais si ce fût mon rire qui attira l’attention de ma mère mais elle entra dans la chambre sans frapper et nous surpris, moi sur Vanda, dans le plus simple appareil, moi tout sourire, Vanda la peur sur le visage.
Ma mère nous sépara en nous traitant de folles, nous disant que nous n’étions pas bien, avec un air outré, presque vexé. Je redescendais dans mon lit, ma mère quitta la chambre en colère en laissant cette fois-ci les deux portes ouvertes. J’entendais Vanda pleurer sans rien comprendre à ce qu’il se passait.
Quel mal y avait-il à jouer ?
 
Après cet épisode, nous rejouions uniquement pendant l’absence de nos parents, lorsque nous étions seules, comme pour nous occuper, ou uniquement encore par habitude. Mais le corps de Vanda changeait à vue d’œil et il était des fois où, quand je lui demandais de jouer, elle rejetait ma demande. Et ce jeu me manquait.
Je cherchais quel plaisir Vanda pouvait avoir à faire des choses qu’on nous interdisait de faire. C’est là que je commençai l’exploration de mon propre corps. Mes mains allèrent dans chaque recoin inconnu jusqu’alors, se parcouraient elles-mêmes et finirent par découvrir le plaisir qu’elles pouvaient me donner.
Vanda eu ses premières menstruations à l’âge de seize ans. Petit à petit, le jeu s’estompait et se faisait de plus en plus rare, jusqu’à finir par devenir inexistant. Vanda avait grandit, son corps s’était transformé et les nouvelles formes qu’il laissait deviner me donnaient encore davantage envie de jouer.
 
Plus tard, j’eu de gros maux de ventre et je me revois empiler des oreillers sous mon ventre, tête appuyée contre le matelas. C’était le seul moyen que j’avais trouvé pour atténuer un peu mes douleurs. Je profitais de ces moments pour poser un oreiller, ou parfois même une peluche, juste là, entre mes jambes, que je serrais alors, comme si mon sexe aussi avait eu mal.
Un jour que nous étions seules, Vanda dans la chambre, moi au salon, je ressenti ma première véritable humiliation. J’étais là, allongée sur le canapé, frottant mon sexe comme dans un mouvement de masturbation infantile et ma sœur m’a surpris, là, en train de faire ce que j’étais en train de faire. Elle me traita de dégueulasse, elle qui une année avant à peine me faisait la toucher sans jamais répondre au désir d’inversion des rôles que je réclamais de plus en plus souvent.
 
Aujourd’hui je ne sais si j’invente ou non cette histoire, à force de vouloir l’oublier je doute de sa réelle existence. Je me rappelle m’être servi de cette « histoire », une fois compris tout le mal qu’elle représentait, pour faire pression sur cette sœur.
Depuis ce jour, ce jour où Vanda m’inculqua malgré elle le mal qu’il y avait à se faire du bien, elle et moi avons fait comme si rien de tout cela ne s’était jamais passé.
Aujourd’hui je me demande en quoi cet épisode incestueux de ma vie peut jouer un rôle sur mes idées et mes peurs associées et incomprises. Du jour où j’ai compris, bien des années plus tard, de quoi il ressortissait de ces pratiques, je n’ai plus jamais joué mais ai continué sans plus m’arrêter cette exploration de mon corps que je voyais se muter en parfaite arme. Je continuais ce mouvement de moi à moi dans la honte, suivant, une fois ma chambre personnelle acquise, les habitudes instituées par Vanda. Je me suis détesté longtemps, pour aimer tant une chose que l’une de mes sœurs vilement, m’avait instruit. Je ne me souviens pas en avoir souffert le temps de son approbation, je me souviens avoir souffert de mon incompréhension et de ma dépossession. Ce de quoi je souffre aujourd’hui est la méconnaissance du regard que je me devrais de poser sur ma sœur. Je souffre sans véritable mal, sans lui en vouloir de quoi que ce soit, sans lui en tenir une quelconque rigueur. Le pire, ou le mieux, est que je ne ressens aucun remord, aucune rancœur, juste une complicité à taire que je partage avec elle, une complicité contraire à la dite vertu humaine…

mardi 20 octobre 2009

Il est des rives

Il est des rives que l’on ne parvient à voir les paupières closes,
Et d’autres qui se laissent toucher d’un doigt mort.
Il est des feuilles qui tombent et jamais ne se posent,
Comme le ferait l’excellence au soupir d’un remord.
Existe-t-il autre part d’autres manières de dire les choses ?
Je m’essaie ici à un genre dont l’ignorance caractérise mes mots.
Et eux-mêmes, que sont-ils ?
Si ce n’est qu’un imparfait assemblage de signes s’alignant à l’insignifiance ?
Il est de ces mots qui dépeignent des lieux et de ces lieux où il fait bon de naître.
Dis-moi pourquoi, quand je ferme les yeux, aucun de ces lieux ne m’incite plus à être ?