Inspiration Mallarméenne

Pour mieux comprendre :

Les numéros entre accolades {.} correspondent à l'ordre d'écriture des feuillets qui diffère volontairement de l'ordre de parution sur la page.
Feuillets inspirés par (et non "tirés de") (les feuillets figurant sur ma page sont donc l'une de mes réalisations et non des extraits de Mallarmé) le recueil d' "éclats" Pour un tombeau d'Anatole de Stéphane Mallarmé, retraçant le cheminement interne de ce père face à la mort de son fils alors âgé de huit ans.

La ponctuation souligne l'ambiance comme le feraient les didascalies théâtrales, visent à placer un décors pour mettre en scène les mots dans lequel ils disent sans plus réciter leur sens. 
L’omission d'articles, marques de la personne, prépositions etc... réfère à l'envie toute personnelle (détachée de l’œuvre originale mallarméenne) de permettre aux mots une reconquête de leur signification pleine et entière, éloignée des référents. Le mot vaut pour lui-même, s'alourdit et se comprend tel quel, de sorte à ne faire jaillir en l'esprit du lecteur que des images de genèse, de toile vierge, rendant la pesanteur de sa volonté de sens, permettant la survenue de l'émotion primaire, sans retenue qu'incombe la compréhension tumultueuse de mots écrasés par la difficulté qu'on a à les entendre.
Cet exercice me concernant correspond à une intention de connaître et d'appréhender le langage encore non-ordonné par les codes linguistiques, comme non-articulé, le langage que je visualise muet, métaphorisant l'enfant à merveille en en permettant sa description la plus solennelle.
Les feuillets du poète ont été retrouvés, manuscrits de papier griffonné. Les spécialistes soupçonnent ces "notes" comme étant des sortes de pense-bêtes visant à créer le squelette d'une œuvre romanesque dont le centre aurait été  le traitement du thème de la mort de l'enfant.
Ces "éclats" sont connus pour être les plus intimes que nous a offert Mallarmé, bien malgré lui, les feuillets n'étaient pas destinés à être lus sous cette forme brouillonne.

Une expérimentation qui réincarne le mot en lui-même.



{11}
Tombes alignées là. Tous ces morts (sol tapi)
  _leurs yeux nous contemplent [êtres mourants]
                 entassent les pierres qui les survivent.


{12}
Le vent souffle qui porte le germe (semence tourbillonnant).
La pluie met fin à l'orgasme des anges. [cri du vent étourdissant]
   _malaise.


{1}
Indomptable. Avancer vaincu. Plus même le sommeil (envolé, perdue). 
[cauchemar de ma mère morte] En fermant les yeux, mon père qui pleure. (transparence)
"partout pourvu que ce soit hors du monde"  (insignifiance)
Pareille à l'enfant muet, son front froid. Avançant
comme des soldats des gerbes de regrets. A gueuler.
La nuit (_me reconnais pas)
[Dehors le vent souffle]


{4}
Petite reliure de sourires. Boucles blondes, main tendue (comme s'il savait).
A côté regarder ceux qui passent convaincus de l'immuabilité. Sans mouvance. Pareils à l'arbre.
_présence ancrée comme des racines. 
    La terre s'entrouvre. Trop tard. (Arbre tombé)
                       Présence acquise laisse place au manque insoupçonné.


{2}
A côté de sœur les Ténèbres. Petit enfant ne bougeant plus (lèvres bleues)
_dit non de la tête. [Sourit pendant qu'elle s'agite]
           N'en peux plus du silence.


{3}
[Petit cercueil blanc. Petit cœur immobile]
_cadavre pourrissant en bas. Souvenir de sa beauté _de leurs cris. Chair rongée.
[Petit corps plein de vers] Petit souvenir attendant (dans la nuit) le baiser de sa mère. 
        _ne pouvait mourir avec de pareils yeux.
Projections lumineuses, illusions perdues.
                                                                             [Tout recommencer]


{5}
Pas d'amour à perpétuité. (...)
_tout mensonge, tout larmes. N'engendre rien. Une patience.
(parfois un éclat de rire, mais souvent rien.)
Inconstance mortelle (comme le vers). [Petit fantôme]
(...)


{6}
Prégnance du rêve (insoluble). Parodie d'un autre
_Demain je ne me souviendrai plus [restera le mal].
                         Ne faut pas rester entre ces murs.


{7}
_Comme un malaise d'être (si parfois je vis). [ventre tyrannique]
        Apothéose (risible).
Feuillets mallarméens.


{13}
Pardonne l'oubli. Prégnance de toi à mon esprit. (entrevue d'une faute).
Cœur trop fidèle, le tien aussi. Te tue. [Trop longtemps]
        _me contraindre à ne pas te penser.


{13bis}
Cœur dégénérescent (faute commise (...))
      _ image de lui devant moi. Honte.
Et des larmes. Un déluge de larmes à te penser.
                                                         Mon Amour.

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